Le Physarum polycephalum : "le blob"

in #francostem6 years ago

Le Physarum polycephalum : un être stupéfiant

800px-Physarum_polycephalum_plasmodium.jpg
[image credits: Wikimedia]

Le Physarum polycephalum est une créature rampante et visqueuse apparut il y a environ 500 millions d’années.
Inclassable dans la catégorisation des espèces vivantes, il ne s’apparente ni à un végétal, ni à un champignon, ni à un animal, ni même à un minéral.

Toutefois, les biologistes lui ont trouvé une place et le considère comme un Mycetozoaire : une catégorie en marge de l’évolution puisqu’il s’agit d’une forme de vie primaire, qui n'est composée que d’une seule cellule et qui est apparue avant même les premiers animaux et végétaux.


Il a été découvert pour la première fois en 1973, au Texas.
Une habitante, découvre effrayée, une monstrueuse masse gluante dans son jardin.
Prise de panique, elle appelle la police ainsi que les pompiers.
Ces derniers, pour se débarrasser et détruire cet ORNI (Objet Rampant Non Identifié) usent de plusieurs techniques : feu, eau, allant même jusqu’à tirer dessus.. mais sans succès...
Plusieurs heures après, la masse a doublé de volume !

Bien qu’il soit unicellulaire, le physarum est capable de grossir, et est susceptible de couvrir une surface d’au moins 10 m2 !
Cette immense cellule est composée de milliers de noyaux qui se développent à l’intérieur d’une même membrane.
Lorsqu’il est affamé, il forme des réseaux d’ex­crois­sances que l’on appelle des Pseudopodes.

Si les biologistes ont eu des difficultés pour le classer, c’est que le physarum emprunte à la fois, des caractéristiques des mondes animal et végétal, mais également des champignons :


  • il produit des pigments comme une plantes
  • il se déplace et se nourrit comme un animal
  • il se reproduit par spores comme un champignon

Les scientifiques l’on surnommé « blob » en référence à un film d'horreur américain de 1958 : « Danger planétaire » en français et dont le titre original est « The Blob ».
Ce film mêle horreur et science-fiction. Réalisé par Irvin S. Yeaworth Jr, Russell S. Doughten Jr. ayant pour acteur principal Steve McQueen.

Synopsis :

Une étrange météorite s’écrase sur Terre.
Deux jeunes adolescents, témoins de l'événement, découvrent à l’intérieur de celle-ci, un monstre gélatineux et organique à l'appétit vorace. Le "blob" va tout détruire sur son passage pour devenir de plus en plus puissant.
Une incroyable bataille pour sauver la Terre commence…


Contrairement à la créature de cinéma, le blob est inoffensif.
Il vit dans les sous-bois et se nourrit de champignons. Vous en avez certainement déjà croisé sans même y prêter attention.

Des caractéristiques hors du commun :


Une composition unicellulaire

Les chercheurs estiment que le nombre total de cellules dans le corps humain est d’environ 30.000 milliards.
Ces cellules sont indispensables pour assurer nos fonctions vitales.
Et bien le blob, avec sa cellule unique, est capable d’assurer toute les fonctions : la vue, l’odorat, l’ouïe, mais aussi les fonctions digestives et respiratoires !

Une résistance à toute épreuve

Il ne craint ni le feu, ni l’eau.
Il a la capacité de cicatriser en quelques secondes et peut être découpé en morceaux.
Chaque morceau devient alors un clone indépendant.
Quand ils sont compatibles, les blobs ont même la capacité de fusionner entre eux.


Un système de reproduction atypique

En effet, il existe 720 genres sexuels chez le blob, ce qui signifie que contrairement à la majorité des êtres vivants sur terre, le blob n’a pas une chance sur deux de trouver un congénère compatible, mais 719 chances sur 720 !
Une particularité qui accroît drastiquement ses capacités de reproduction.
En opposition avec cette masse visqueuse et peu ragoutante, les spores du blob sont particulièrement magnifiques, à tel point que certaines personnes les collectionnent.


Une capacité à se déplacer

Un blob est capable de se déplacer à environ 1 cm/heure, et peut atteindre les 4 cm/heure s’il est affamé.
Il peut même ramper sur l’eau.


Une quasi immortalité

Audrey Dussutour (chercheuse au CNRS) est une des rares française à étudier les blobs en laboratoire.
Elle nous apprend qu’au bout de quelques mois, le blob se fatigue.
Pour le régénérer, il suffit alors de le placer à la lumière et de le faire sécher.
Il se rétracte et perd 70% de ses protéines et peut rester dans cet état plusieurs années sans bouger.
Pour le « réveiller », il suffit de le mettre en contact avec de l’eau et le blob retrouve une seconde jeunesse.
Audrey Dussutour travaille avec la même souche depuis environ 10 ans.
Fait remarquable : cette souche provient d'un laboratoire américain qui l’utilisait depuis près de soixante ans.

Le blob : un être intelligent et doté d’une personnalité

Cet organisme ne cesse d’étonner la science.
En effet, les biologistes nous apprennent que les blobs sont dotés d’une intelligence.
Cela va à contre courant de la pensée scientifique, qui a toujours cru que l’intelligence était liée aux neurones et donc au cerveau.
Force est de constater que le blob, qui est je le rappelle unicellulaire et ne possède pas de cerveau, est capable de non seulement résoudre des labyrinthes, mais est aussi habile pour retenir des informations et même les transmettre.



[image credits: Giphy]

Ci-dessus, la résolution d’un labyrinthe par un blob.


Doté d’une mémoire spatiale, le blob est capable de ne pas repasser deux fois au même endroit.
Afin d’éviter de réitérer des erreurs, il est également capable d’apprendre de ses congénères, en fusionnant.

Trouver le plus court chemin dans un labyrinthe est un jeu d’enfant pour le blob.
A tel point que certains chercheurs travaillent actuellement sur des « bio-ordinateurs » à base de physarum.
Les blobs pourraient ainsi remplacer des circuits électroniques, avec l’avantage de pouvoir s’adapter en temps réel à leur environnement.

La société PhyChips utilise actuellement le blob pour concevoir des algorithmes pour les intégrer à leurs puces.


Le blob et le réseau du métro de Tokyo


Comment optimiser un réseau de distribution ferroviaire ?


C’est un problème terriblement complexe : il faut tenir compte des densités de population mais aussi de la géographie (montagnes, fleuves, reliefs etc…) et de la localisation des principaux points névralgiques.
Il faut également que le réseau soit à la fois robuste et adaptable afin de proposer des itinéraires alternatifs en cas de défauts journaliers, tel que des pannes matérielles, des accidents etc…

Il faut savoir que des centaines d’ordinateurs tournent à plein régime et en temps réel pour trouver des solutions acceptables à ce genre de problèmes.


Le blob est-il la solution ?


En 2010, un scientifique japonais spécialiste du Physarum, avait réparti des flocons d’avoine sur une plaque de manière à représenter la disposition des principales villes de la région de Tokyo.
Puis, il avait placé un blob au milieu du dispositif. Ce dernier, comme à son habitude s’est d’abord étalé pour explorer son environnement.
Ensuite, il s’est redéployé, en traçant des routes vers les sources de nourriture qu’il avait identifiées auparavant.

En l’espace de 24 heures, le blob avait pris la forme quasi exacte du réseau ferroviaire de Tokyo et en se permettant même d’y incorporer quelques améliorations !

De la même manière, le blob a été capable de retracer les axes bien connus de notre chère France.
Le résultat est bluffant.

Le blob ne construit pas les réseaux de façons aléatoires.
Avec ses millions d'années d'expérience, il est passé maître dans l’art d'optimiser son réseau de distribution alimentaire.
Cette immense cellule développe des branches qui changent sans cesse de forme et de taille à l’intérieur d’une même membrane. Il s'adapte aux variations des stocks de nourriture, et son réseau entier peut se déplacer de plusieurs centimètres en l'espace de quelques heures.

Une intelligence dotée d’une personnalité

Encore plus incroyable, le blob semble être dotée d'une personnalité.
Audrey Dussutour, a étudié en laboratoire, dans la même expérience, trois souches de nationalités différentes (une australienne, une japonaise ainsi qu’une américaine).

Le but de l’exercice était de résoudre un labyrinthe avec de la nourriture biologique.
Elle s’est aperçut que la souche japonaise essayait de résoudre le problème au plus vite, quitte a faire des erreurs, que la souche australienne prenait plus le temps de la réflexion et ne commettait aucune erreurs, et que la souche américaine était désorientée, car elle n’était pas attirée par la nourriture biologique.

Ces différents caractères nous suggèrent que ces êtres dépourvus de cerveau ont beaucoup de choses à nous apprendre sur notre interprétation de l’intelligence.

Conclusion

Cet être aussi surprenant soit-il, est capable d’apporter à la science des perspectives encore non explorées.
Le blob intéresse et interpelle. Il est capable de captiver les biologistes, les chercheurs en électronique, en informatique, mais est aussi susceptible d’apporter des solutions dans le milieu médical.
En effet, depuis peu, les découvertes révèlent que le blob a des propriétés antifongiques et antibactéricides, il pourrait même faire avancer la recherche sur certaines pathologies.

Son mode de fonctionnement ainsi que son développement ressemblent étrangement à une tumeur.
Un cher­cheur alle­mand, nous apprend que son réseau veineux obéit aux mêmes lois physiques que la vascu­la­ri­sa­tion des cellules cancé­reuses.

Le blob offre t-il une nouvelle perspective de compréhension concernant la formation du cancer ?


Sources :

Cnrs
Futura Science
Lejdd
Le nouvel observateur
Le web pedagogique

Pour aller plus loin :

Le livre d’Audrey Dussutour
Les puces phychips
L’incroyable blob


U5dqt3qEsfpG5JRqZYbT8aMNhfjpk4w.gif

Sort:  

C'est vraiment une creature magnifique, je n'ai pas su que qqchose comme ca existe... merci pour partager!

Tu peux en acheter un si tu veux ! bon par contre ça mange beaucoup ! Merci pour ton commentaire @leurbanexplorer ;-)

C'est fou ! Super intéressant comme article ! Bravo :)

Merci @imcore c'est sympa ;-)

Salut Yann, Tu poursuis admirablement sur ta lancée: des articles passionnants accessibles à tous! Bravo! Je me souviens d'une partie de "l'Appel de Cthulhu", un jeu de rôle où nous avions imaginé une telle créature avec une bande de copains...Huhuhu....! C'était il y a une vingtaine d'années...Quand on voit les progrès au niveau des sciences moléculaires, en France notamment, on se dit que tout devient possible!

Merci beaucoup @floxe pour ton soutiens ! J'espère lire ton article bientôt ! Bon, je sais déjà qu'il va m'intéresser.
J'ai déjà eu un avant goût sur discord ;-) à bientôt !

Vraiment fascinant!
Merci pour cette découverte! :)

Hey y'a pas de quoi @curiousshibby ! avec plaisir ;-)

Grrrr c'est flippant mais qu'est ce que c'est intéressant, comme toujours

Merci @albatar pour le soutiens ;-)

Qu'est ce que j'aimerais avoir ton inspiration^^

WOUA ! Alors là, tu as piqué ma curiosité la semaine dernière sur discord quand tu m'as annoncé un article sur le Blob. Eh ben, pas déçu du résultat! Etonnante créature que je viens de découvrir. Ton article est vraiment génial, d'où t'es venue cette idée ? Upvoté et resteemé!

Merci beaucoup @duke77 ! Content que ça t'ai plu ! L'année dernière, je suis allé en Corse, j'ai rencontré un habitant qui m'a fait découvrir ce fameux blob... Il était violet, et apparemment il en existe de toute les couleurs ! J'ai trouvé ça dingue !
Merci pour le soutien encore une fois ;-)

Coup de coeur pour cet article. Et je ne connaissais pas du tout.
Merci ! :)

Ha! Je suis bien content ! Merci pour ton commentaire @gribouille ;-)

Puree, des fois la nature est surprenante! Puis le nom... franchement chapeau. Pour une fois qu'on n'a pas droit a un acronyme pourri :)

Plus ça va, et plus je me dis que la nature est incroyablement bien faîte ! L'intelligence est partout ! C'est vrai que le nom est original pour une fois, mais s'il avait été découvert avant, je pense qu'on aurait eu droit à un nom latin du genre : " DMVQ deformia meditari viscoso quisquiliae " ;-)

Pour je ne sais quelle raison, DMVQ me fait penser a DTC... ;)

Aussi oui ! pour "diphtérie tétanos coqueluche" évidement ! Mdr ;-)

Bien sur! Pour qui me prends-tu? :)

Waouh, c'est vraiment une totale découverte pour moi ce Blob !!! Très bel article ;-)

Merci @berthet, c'est sympa :-)

Oufff impressionnant! Là, je l'avoue, je suis scotchée! Quelle drôle de créature ce "blob"... je vais aller digérer tout ça! :P

Hey ! merci beaucoup @lamouthe ;-)
Comme je disais à monsieur, la nature est folle ! ;-)